Bilan du projet IOSSS ESPADON

Le projet IOSSS- ESPADON a été mis en place pour étudier la structure génétique du Stock d’espadon à l’échelle de l’océan Indien afin de contribuer à meilleure gestion de cette espèce par la Commission des Thons de l’Océan Indien (CTOI).
Est-ce qu’il existe un ou plusieurs stocks dans l’océan Indien ?
Est-ce que les espadons du sud-ouest de l’océan Indien sont isolés des autres espadons de cet océan ?
Quels sont les liens qu’il existe entre les espadons de l’océan Indien et ceux des océans Atlantiques et Pacifique ?

Objectif du projet IOSSS - ESPADON

Le projet IOSSS-ESPADON a été mis en place dans un but précis : répondre à une problématique de gestion émise par la Commission des Thons de l’Océan Indien (CTOI) à savoir :

« Mieux connaitre la structure du stock d’espadon de l’océan Indien (OI), une ressource estimée pleinement exploitée à l’échelle de cet océan avec un réel risque de surexploitation dans le sud-ouest de l’océan Indien (SOOI)» (IOTC, 2008).

Connaître la structure du stock d’une espèce est indispensable pour être en mesure de garantir une gestion efficace de cette ressource. Dans le cas de l’espadon de l’OI, la question qui se pose est de savoir si la CTOI doit mettre en place des mesures de gestion spécifiques dans le SOOI (TAQ, QUOTAS, fermeture spatiotemporelle…), avec toutes les contraintes économiques que cela implique pour les armateurs des pays opérant dans cette région. Si telle est le cas, la CTOI doit s’assurer que les espadons capturés dans le SOOI appartiennent à un stock différent du reste de l’OI et qu’une surexploitation dans cette région peut effectivement conduire à la déplétion de ce stock en particulier. Dans le cas contraire, si les espadons du SOOI appartiennent au stock de l’ensemble de l’OI, une tendance à la surexploitation localisée dans le SOOI n'aurait en pratique que peu d'effet sur l'ensemble du stock global. Par contre, les mesures de gestion qui en découleraient se révèleraient très pénalisantes pour les armateurs, sans pour autant présenter de réels bénéfices pour le stock. Pour les armateurs réunionnais, les conséquences seraient non négligeables. En effet, cette flottille cible l’espadon (plus d’un tiers de ses captures) dans le SOOI depuis le début des années 90 (Evano et Bourjea, 2012). Contrairement aux autres flottilles (espagnole, taïwanaise, japonaise, portugaise…) cette flottille réunionnaise est constituée de bateaux de petite taille (longueur inférieure à 24m) et n’a donc pas la capacité d’explorer des zones plus lointaines et d’adapter son activité à la mise en place de mesure de gestion spécifique dans le SOOI. 

Qu’est-ce qu’un Stock de poisson?
Un stock halieutique est un sous-groupe d’individus (appartenant à une même espèce) isolé et indépendant du reste de la population. Les individus d’un stock se reproduisent entre eux, et non avec les individus des autres stocks.

Dans le cadre du projet IOSSS ESPADON

Et la génétique dans tout ça ?
La génétique des populations est un outil pour identifier les stocks. Elle permet de calculer la différenciation génétique entre les populations, et d’en déduire leur isolement ou leur connectivité les unes par rapport aux autres.

Bilan de l’échantillonnage de IOSSS – ESPADON

Plus de 2500 échantillons d’espadon ont été collectés dans le cadre du projet IOSSS-ESPADON via une stratégie d’échantillonnage stratifiée dans le temps (4 saisons de 2009 à 2011) et dans l’espace (9 zones dans l’océan Indien, une zone dans l’Atlantique Sud-est et une autre dans le Pacifique Sud-ouest). Cet échantillonnage a été possible grâce un réseau international de partenaires scientifiques. Ces échantillons ont été analysés dans le laboratoire de génétique des populations de la Délégation Ifremer océan Indien dans le respect de sa démarche qualité, assurant la traçabilité et la fiabilité des analyses.

Les résultats et conclusions de projet IOSS – ESPADON

La population d’espadon de l’océan Indien forme un seul et unique stock incluant la zone sud-ouest. L’océan Indien dans son ensemble peut donc être considéré comme l’unité de gestion de l’espadon Le stock indien est clairement isolé de la population d’espadon de l’Atlantique Sud, par contre les relations avec le Pacifique sont plus complexes : tous les indices laissent supposer l’existence d’échanges limités entre ces 2 océans.

La partie la plus significative de ce projet portait sur la description de la structure génétique de l’espadon à l’intérieur de l’océan Indien, et la nécessité de pouvoir évaluer si les espadons du SOOI appartenaient ou non au reste de l’OI. Les deux marqueurs moléculaires que nous avons utilisés montrent une variabilité génétique importante et similaire des d’espadons entre les différentes régions échantillonnées dans l’OI. Les analyses à une échelle spatio-temporelle, et par sexe, n’ont révélé aucune structure particulière au sein de ces groupes. Ces résultats confirment que la population d’espadon de l’océan Indien forme un seul et unique stock et que les espadons de la zone sud-ouest ne forment pas un sous stock distinct du reste de l’OI.

Il faut cependant garder à l'esprit que ces conclusions portant sur la structure génétique ne reposent que sur les seuls marqueurs génétiques utilisés dans cette étude. Même s'il est cohérent de considérer que les espadons de l’océan Indien n’appartiennent qu’à un seul et même stock, incluant ceux du SOOI, d'autres approche scientifiques, comme l’étude des otolithes dans une approche de structuration des stocks, une approche de marquage électronique, doivent être mises en place pour confirmer ce résultat à l’avenir.

Mais le projet IOSSS-ESPADON c’est aussi

La collecte de plus de 700 paires d’otolithes pour confirmer (via des études morphologiques et microchimiques) la structure du stock.

L’étude de la biologie : Plus de 6000 mesures biométriques pour suivre la structure en taille des populations ; La détermination du sexe et du stade de maturité d’un millier d’espadons pour identifier les zones et périodes de reproduction

L’étude de l’écologie alimentaire : avec l’analyse de 535 contenus stomacaux révélant les principales proies des espadons (poissons, céphalopodes, crustacés) ; l’étude des ratios isotopiques d’azote et de carbone pour situer l’espadon dans la chaîne alimentaire marine.